J'ai toujours joué à la bonne élève, mais je préférais écrire des poèmes que de faire mes devoirs.
Je n'ai plus l'âge d'aller à l'école, des devoirs j'en ai beaucoup et je n'ai toujours pas envie de les faire, alors pour marquer cette rentrée sous le signe de la poésie, je décide d'écrire un poème par jour, instantané, avec une photo du jour.
En hommage à mon grand-père Robert, qui écrivait de magnifiques poèmes et que je n'ai pas eu la chance de rencontrer. Pour ma mère qui m'a tant donné et dont je réalise quelques rêves, pour qu'elle ne perde jamais son inspiration poétique.
Un défi d'inspiration et de constance, un ancrage de mots là où je n'ai plus de domicile fixe, où les certitudes finissent en fumée, et où seul compte l'élan de vie, passionné, de vivre pleinement avec plus de conscience et d'intégrité, de joie et d'amour.
L'écriture est une manière de transmuter les ombres et de créer sa réalité.
Voici mon poème de rentrée, brut, avec tout ce qui grouillait de vivant en moi. Je lâche la perfection et je lâche tout jugement. Juste des mots qui jouent ensemble à la récré.
Pour changer de regard, sonder mon intérieur et être plus présente à ce que je vis.
Cécile Papillon 🦋
Poème #1
2 septembre 2025
Un jour de rentrée
à demi étourdie
d’errances amères
je roule en boule dans mon cœur chiffonné
nuages à l’horizon
sans savoir où je vais
je roule vers la mer
diktat de la rentrée
je n’ai pas de cahiers
pages envolées
à l’école buissonnière
j’ai couru vers mes rêves
je me sens essoufflée
à gravir les montagnes
nager à des années lumière
à contre courant
J’ai pourtant vu des poissons volants
Ce matin les oiseaux bringue balants
s’accrochent aux branches
un chat dans la gorge
on leur a toujours dit
qu’ils ne savaient pas voler
et si tu lâchais enfin ta volonté ?
Corps en déséquilibre,
Peux-tu juste accueillir
le blues et la grâce d’être en vie
respirer en ton âme
l’esprit
et danser comme s’il était possible
de voler
Danser les pieds sur terre
prendre le droit de ne rien faire
un jour de rentrée
photo devant une école à Auray, Bretagne
Poème #2
Où est la clé ?
tout est sang dessus dessous
en moi l’écho d’une terre
en guerre
c’est l’éclatement
je crois que j’ai peur
comme une enfant
la tour de garde me regarde
tour à tour je me méprends
je sens arriver au loin la puissance
d’un grand vent je suis emportée
suffit-il de savoir tourner
avec le vent pour qu’il soit mon allié ?
tu as éparpillé des bouts de toi
des affaires par ci par là
En pensant que tu finiras bien
quelque part
par te sentir bien
quelque part…
si longtemps nomade
tu ne sais pas où tu t’arrêteras
où tu poseras
ton corps perdu
où tu vivras
ta terre promise
Rage
d’avoir accepté tant d’années
d’être en exil
tu as juste trouvé le courage
d’écouter la voix qui dit “trouve la clé, c’est terminé”
tu entrevois
une île !
Ils ont essayé de te dissuader
alors qu’il suffit d’y croire
et de t’en remettre à Sa volonté
ils ont essayé de te diminuer
de t’attacher
alors que tu ne peux t’empêcher
de repousser les murs de crier de déborder
tu en mets partout
de la vie
tu ne peux plus contenir
ton expansion
ni te retenir d’exister
ni t’excuser de ton chaos
Il faudrait un tremblement de terre pour que tu perdes tes esprits
et même dans un tremblement de terre
tu ne perdrais pas ton seul guide
le grand Esprit
Longtemps j’ai fait ce rêve
qui devenait cauchemar
j’étais capable de voler
je m’élançais vers le ciel,
et là des hommes couraient de plus belle
pour me rattraper
ils m’attrapaient les chevilles
me privant de ma liberté,
je me retrouvais des boulets aux pieds.
Il faudrait un tremblement de terre
pour que je finisse par m’écrouler
ensevelie vivante
même si j’ai grandi sur des ruines défaillante
à chaque fois que j’ai perdu pieds
il y avait la mer pour me bercer
je connais une femme extraordinaire qui a dansé l’amour
avec un dauphin dans la mer
quand on aime y a pas de barrières
et quoi qu’il se passe sur terre
tu es et seras toujours aimée
Tant pis si tu éparpilles tes affaires
si tu cherches ta maison
tu finiras bien par la trouver
la clé
tu es en chemin
vers ta liberté
Respire
tu es chez toi
tu es arrivée
entre en toi et repose-toi
de tes insomnies
mais gare à toi si tu t’endors
somnambule dans la nuit d’or
23h23 tu ne verras pas
tes rêves en miroir
assoupis dans un tiroir
somnambule sans le savoir
tu te retrouveras dans le placard
est-ce réel ce cauchemar ?
ouvre les yeux et réveille toi !
retourne-toi dans la bonne direction et marche
La vie est grande
et tous les chemins mènent au mystère
Il est là devant toi
ouvre la porte
respire l’air frais et le soleil
tu n’as plus besoin de clé
laisse-toi guider seulement
par le frémissement de ton âme
où le vide lumineux
danse Dieu
dans tes mains
Poème #3
D’une main légère
elle joue
à suivre le vol des hirondelles
de la poussière elle se soulève
le grand chêne danse de plus belle
à ses pieds des racines profondes
Elle entend alors les pas
d’une biche qui apparaît
entre les blés frêles son faon s’affole
elle dans son cœur fauve
elle bondit de gaité
elle foule la tendresse de la rosée
c’est la fin de l’été
En cadence elle chante
les rêveries caduques
de sa vie sauvage
frémissent au vent les feuilles
libres des lendemains
telle la feuille elle sait
qu’un jour elle saura se détacher
qu’un jour peu lui importera
la ville qui l’emmure et l’étrique
dans les roulements assourdissants
des moteurs effrénés
des mâchoires serrées
des 400 coups d antan
elle se moquera de choisir
100 grammes de bonheur sans rougir
la banque qui irait avec sa vie
elle n’aura plus le temps
de se perdre dans les déviations,
ni de se balader en rose
dans les chantiers interdits
Telle la feuille orange elle sait qu’un jour
elle n’aura plus peur d’aimer
Finie la java au feu rouge
l’impatience feutrée
devant un feu vert
peu lui importera
de la statue bleu de la modernité
Miss Dior en drapé dénudée
la nouvelle élégance en or
qui n’ose s’indigner
si elle se retrouvait résignée
au pied d’un faux sanctuaire consommée
si elle faisait l’aumône le soir
sans réussir à s’en sortir
si elle n’avait besoin de rien
de rien d’autre qu’un sourire…
elle flairerait alors
les commissures des lèvres
mais les commissaires
ils s’affairent en retard car
on leur a dit attention
une retraite ça se prépare
un mariage aussi
ils sont tous tombés amoureux
des engrenages
de leurs carnages
…
bientôt elle n’aura plus
besoin de rien
elle traversera au feu vert
boulevard de la liberté
elle sentira un vent de lumière
dans les yeux de son bien-aimé
elle saura au creux de ses mains
la patience bâtisseuse
dans la chaleur des pierres
elle se recueillera
dans la beauté des cathédrales
au creux de ses mains
Elle ne vivra de rien
elle se soulèvera
et un jour poussière elle retournera
une main légère la guidera
là où s’envolent les hirondelles
Poème #4
PRIER
c’est me relier à l’infime caresse
d’un rayon de soleil
c’est savourer le miel
du bout de ma langue
un goût d’éternité.
Prier
c’est faire acte de présence
écouter dense
les sens affinés
ne faire plus qu’une avec la réalité
et remercier pour cette fête
à laquelle je suis conviée
Prier
c’est poser mes mains sur le ventre
de la terre,
la sentir et la remercier,
c’est pouvoir m’émerveiller
Prier
c’est prendre en mon cœur toutes les guerres
d’abord les miennes les apaiser
c’est oser danser mes colères
être en lien avec plus grand
quand le doute survient,
c’est suivre l’appel de mon âme
y croire et me laisser guider
Prier
c’est bénir mes amours perdus
embrasser le chagrin
remercier chacun d’avoir été
sur mon chemin
Prier
c’est honorer le grand amour
le divin celui qui ne va pas me quitter
c’est offrir de l’amour à mon désamour
boire à la source
ma puissance de vie
Prier
c’est ne pas tomber dans l’ennui
continuer de créer ma vie
en suivant ce pour quoi je suis
c’est lâcher ma volonté
accueillir la force divine
qu’elle devienne entièrement
force conductrice de ma vie
Ainsi soit-il !
Poème #5
TOUT COMMENCE
dans un jardin d’enfance
la joie et l’innocence
cueillir des boutons d’or
sous le menton ça faisait rire
si ça faisait jaune tu te souviens
c’est que tu aimais le beurre
et délicieusement un à un
enlever les pétales des pâquerettes
je t’aime un peu à la folie
ah oui un peu c’est déjà beaucoup
et des bouquets pour mon Papa
à la folie quand il était là
Retrouver mon jardin d’enfance
assise dans les herbes douces
je rêvassais longtemps sous le cerisier
présente avec tout ce qui est
dans ma joie d’exister
Dans ce jardin du bonheur
c’était un peu le paradis
je jouais avec mes deux sœurs
la troisième nous rejoindrait plus tard une voix m’avait dit
l’odeur d’une charlotte aux fraises Maman nous appelait pour goûter
c’était plein d’harmonie et de simplicité
Je ne savais pas que le paradis
pouvait un jour se dérober sous mes pieds
Quand Papa est parti
il nous a laissé
une blessure de vie
vie
o
lance
j’ai pourtant chaque fois essayé
de cacher la clé, de le supplier…
j’ai vu Maman pleurer trop d’années
mes petites sœurs apeurées
Papaouté je chantais comme Stromae…
Quand tout se reliera en toi
quand tout en toi dansera Dieu
tu sentiras que la souffrance est illusoire
que tu n’es jamais seule dans le noir
Donne ton corps à l’univers
ose rugir à l’envers
pour ne plus rougir, libère
transpire ce qui te serre
la rage au ventre
danse la douceur sauvage
deviens une lionne dans le noir !
Chère maison à la mer
tu t’es transformée en appart moquette marron en zup sud
square d’Italie pas en Italie
10 ans après je suis partie
seule oui dans la vraie Italie,
d’amour et d’eau fraîche je me suis nourrie
mais il n’y a pas d’amour heureux
je me suis mise en quête du clown
je n’avais plus envie de l’appeler Dieu
J’ai toujours eu une bonne étoile
des étoiles dans les yeux,
touchée par la grâce
j’ai pleuré de joie
comme une madeleine
j’ai chatouillé une limace
j’ai vu apparaître ses petits yeux
qui voulaient voir au bout de ses antennes
qui osait ralentir sa cadence
j’aimerais savoir si les limaces
elles ont déjà connu la haine
pour certains c’est vrai
qu’aimer un peu
c’est déjà beaucoup
et parfois un peu c’est vraiment beaucoup
ça a fait couler du noir sur mes joues
Puis un soir j’ai rencontré un poète ferrailleur
qui construit un village du bonheur
avec des bouts de rien
des bouts de son cœur
un sacré rêveur
un des plus fous et purs de cette planète
il m’a dit écoute
« à tenter joyeusement nos audaces, nous attirons les miracles »
Merci pour la ferveur des girouettes célestes
merci les cathédrales de bric et de broc
faites de saintes mains pas de pacotille
merci pour la folie des grandeurs
celle qui permet de voir plus loin
dans l’infini du ciel
je crois en ce chemin de l’âme
en ce jardin d’enfance
où chacun peut cultiver sa lumière
s’émerveiller et bâtir son humanité
Car un jour j’en suis sûre
les hommes jetteront leurs armes leurs idoles d’or
ils laisseront la source d’amour
remplir leur cœur et leur faim
ils bâtiront ensemble un jardin de paix
où ils se réuniront simplement
la main dans la main
Cécile Papillon
« L’utopie n’est pas facultative
notre survie en dépend » Robert Coudray, poète ferrailleur
Poème #6
D’OÙ NAÎT LE SOUFFLE ?
- Aah!
- B comme bébé
- O comme origine…
- Ovni tombée des étoiles ? ange tombé du ciel ?
- Elle est née un matiN de printemps violet à l’orée d’une forêt, elle ne se sentait pas séparée de l’univers
- D’où vient cette lumière, bleu indigo dans ses yeux verts ? Elle pose sur le monde insensé son regard, ouvert au mystère
- Son corps a grandi et souffert…elle s’est épanouie comme une rose , naïve elle a cru que c’était l’amour, les rouge baisers des contes de fée, l’innocence de sa générosité…mouillée sa joie essorée, cabossée, déboussolée…elle a fini par essuyer les tables et les plâtres
de la potiche qu’on a voulu en faire
- Une histoire de blasphème d’un idéal de la sainte et de la femme fatale. Statue de sale déesse, sucrée ou salée, on lui donne mille visages
- Elle a bien le droit de se pavaner de montrer ses couleurs, elle ne veut pas être sage
pas de poussinette en poussette
ni d’ogresse goulue en vedette
elle ne veut plus de ces miettes
elle dégouline de rires et d’extases
elle a de la lionne le noble courage
elle est la dragonne qui s’enflamme
elle est papillon qui vole
comme on lui disait à l’école
- Parfois elle se débat : les injonctions à être productive, c’est une mauvaise parodie !aujourd’hui elle voudrait juste se laisser être, sentir la source de son désir, vivre à partir de ses inspirations
- D’où naît le souffle ? Où retourne le souffle ?
- Les ondes bleues se déversent
sur ses ailes nues
elle danse sous l’orage cru
ses formes et forces abondent
les pluies profondes fécondent
Elle est abondance !
Elle écoute
le silence des nuages
où disparaissent les mirages
où coulent ses larmes
et de ses larmes essentielles naissent les arcs-en-ciel
aux nuées d’orange et d’or
elle demeure alors
pleinement en son cœur
elle arrose
ses graines de joie
les blancs jasmins étoilés,
les cosmos fushia passionnés,
les coquelicots sauvages,
les fleurs de la déesse Isis, les roses rouge et blanche, les dahlias du soleil, les lotus sacrés…
et elle entend :
- « Va et marche avec Dieu sans rien sur ton chemiN, perds toi et dépouille-toi dans la forêt sauvage, remonte vers la source et réveille-toi plus vivante ! Ramasse tous ces débris de toi…
de Sa force rayonnante tu peux tout recréer pourvu que tu sois douce, sens Son souffle, un pas après l’autre, présente à chaque pas que tu soulèves,
funambule de ta vie, rejoins l’autre rivage,
cueille le vide…suis l’appel
et n’aies crainte,
ton âme est libre et belle,
belle et rebelle ! »
Cécile Papillon 🦋